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Un peu de tout, de moi, de nous... A lire, à sourire, à commenter et à partager!

mardi 24 septembre 2019

Impératif imparfait

Pour arrêter de contrarier mon plus fidèle lecteur, je vais rédiger un article franco-français et sans mots compliqués. Enfin si, au moins un. Mais j'y reviendrais plus tard.

Quand on a un enfant, et a fortiori quand on en a plusieurs, on renonce par nature à tout égocentrisme (pour Monsieur D. : ego = soi, centrisme = le truc que tu mets au milieu). Le centre est subtilement déplacé sur la progéniture.
Ton enfant est malade? Tu te lèves la nuit même si tu es crevé, que tu as un examen le lendemain ou que tu as fait la noce la veille.
Ton enfant est matinal? Tu renonces à la grasse matinée.
Ton enfant a rendez-vous chez le médecin/dentiste/masseur? Tu l'emmènes, tu attends dans la salle à côté, tu le ramènes à la maison. Peu importe que tu sois censé travailler, étudier ou autre.
Ton enfant s'écorche le genou? On t'appelle. Ton enfant vomit à l'école? On t'appelle. Ton enfant a mal au ventre à l'école? On t'appelle. Et quand on t'appelle, la réaction qu'on attend de toi, c'est que tu laisses tout tomber, ton boulot, ton cours de salsa, tes lessives en retard, ton dîner sur le feu ou toute autre chose qui t'occupait, toi, dans ta vie, et que tu récupères ton rejeton mal fichu.
Parce que quelle que soit la chose que tu étais en train de faire, elle peut attendre. L'ego passe après le boueb, du moins en cas d'urgence. Tu laisses tout tomber et tu mets ton enfant au centre. C'est un impératif.
Ce qui est un peu compliqué, quand on a plein d'enfants, c'est que les enfants se retrouvent au centre l'un après l'autre et que quand les urgences se succèdent, y a un moment où t'es tellement plus au centre que t'as l'impression que tu t'es même fait virer du cercle, qui pourtant, au départ, était bien le tien. Mais ce n'est pas le sujet.

Tout dernièrement, il a fallu mettre l'ado au centre, un peu à la va-comme-je-te-pousse. Grosso modo, ça faisait 3 mois qu'il était blessé. Alors on l'a emmené chez le médecin, qui a trouvé une déchirure musculaire et l'a envoyé soigner ça chez le physio. Qui a fait faire des exercices et s'est un peu étonné qu'il y ait toujours des douleurs, mais pas tant plus que ça. Donc il a repris le foot, en version un peu plus modérée qu'avant. Premier match, après 45 min, il sort, trop mal. Zut. Quatre jours après, il boîte toujours bas, alors on passe en mode "soins médicaux non urgents". On retourne chez le toubib, qui ordonne une radio. Il va faire sa radio... Le lendemain, on passe en mode "soins médicaux un poil plus urgents" quand la gentille secrétaire appelle pour dire qu'il faut reconsulter au plus vite et - je cite - "qu'il ne faudrait pas qu'il marche trop, qu'il ne mette pas de poids sur sa jambe, qu'il ne coure surtout pas" (pile quand il vient de partir à l'école avec son sac de gym pour 2h au stade, parce que bon, t'essaies, pis si jamais t'as mal tu dis au prof - et c'est là que l'an 2019 et les téléphones portables te rendent un fier service, parce que tu te retrouves à téléphoner un peu en cata pour dire qu'il ne DOIT ABSOLUMENT PAS COURIR). Tu prends quand même rendez-vous en dehors des heures scolaires, parce qu'il ne semble pas que ton enfant risque d'y laisser sa peau s'il attend le lendemain.

Et puis le lendemain, on tombe dans la 4e dimension. Le toubib a pas l'air totalement paniqué, mais il explique assez vite que les nouvelles ne sont pas bonnes. Il sort un mot trop long et avec trop de y pour le placer au scrabble (épiphysiolyse, juste au cas où vous me croiriez pas) et assez vite, il dit que dans le meilleur des cas, ce serait 2 mois de béquilles sans poser la jambe. Cherchez l'erreur. Dans le pire des cas, c'est opération. Il commence par dire qu'il faut qu'on prenne rendez-vous avec la Callie Torres locale (les fans de Grey's anatomy comprendront) et que s'ils ne proposent pas un rendez-vous assez vite, il prendra rendez-vous lui-même, avec le poids de son titre académique. Et puis tout à coup il se ravise, saute sur son téléphone et appelle le Seattle Grace (ceux qui n'ont pas compris Callie Torres ne comprendront pas non plus :p). Il fait des grimaces pour me demander si on peut aller la voir maintenant, Callie. Tip top, j'avais justement mis l'ado au centre et lâchement abandonné ses frangins dans un coin. Il me fait un billet pour la ponte de la traumatologie, nous fait graver les radios sur CD et nous expédie. Moi, en mode no-stress, je passe à l'étage "radiologie" parce que j'avais un papier à ramener, même si j'ai bien compris que je devais encore passer à la réception chercher mon CD, enfin bref, j'ai perdu 3-4 min à tout casser... mais voilà pas que le toubib, il est à la réception en train d'essayer de m'appeler, tout stressé qu'on ne soit pas encore à l'hôpital. A ce moment-là je suis un peu inquiète du diagnostic mais stressée, pas encore, plutôt envie de lui dire calme-toi Georges. Bref, on part à l'hosto. Etiquettes, attente, le bins habituel. Arrive Callie. Moins latino que l'originale, et plus survoltée. Gentille, mais un poil alarmiste. Les deux mois en béquilles ne sont plus une option, la seule option qu'elle voit, elle, c'est de planter une vis de 7 cm dans le fémur de mon bébé. J'encaisse. Je le regarde. Il est en mode punching-ball. OK, ben on va faire ça alors, y a pas tant l'air d'y avoir de plan B. En vrai, je sais pas trop à quoi je m'attendais, sûrement à un truc qui s'organise sur des semaines. Mais voilà ma Callie qui nous explique que comme il a 14 ans, il doit aller en pédiatrie, dont faut monter à la capitale, mais qu'elle, normalement elle opère ici, mais elle va voir si elle peut s'arranger; et puis elle se met en mode centrale téléphonique (genre "911 quelle est votre urgence", pas "j'aimerais le 22 à Asnières"), la voilà qui appelle la grande boîte orange, le bloc, son copain Aldebert qui connaît celui qui gère les plannings des blocs; une fois qu'elle a une salle, elle commute sur l'anesthésie, parce qu'en plus de la table, il faudrait quelqu'un pour le shooter, ce petit; et là sans trop comprendre je l'entends dire "demain après le vasculaire". Vasculaire je sais pas de quoi elle parle, mais par contre demain, ça je capte. DEMAIN (il est 17h30). Nouvelle commutation sur la pédiatrie, puis le service je-sais-pas-quoi qui gère les lits. Et quand le tourbillon des téléphones s'arrête, elle nous regarde et nous lance "alors c'est tout bon, tu as une place en pédiatrie, faut être à Sion à 7h à jeun, je t'opère vers 10h30. L'ado n'a pas eu le temps de reprendre son souffle, moi non plus. "Ca pose un problème?" Eeeeeeeuh en fait non. J'avais une vie, mais ça, c'était avant.

Voilà. Depuis maintenant presque 4 semaines, l'ado en a marre d'expliquer ce qui lui est arrivé, alors comme ça, si vous le croisez, vous ne lui demanderez pas. Tout s'est bien passé, il se retape. Il a finalement pu sortir de l'hôpital le jour même. Son autonomie est intacte à part quand il doit partir de la maison ou y revenir (mouais, je sais, fallait pas habiter au sommet d'un hameau avec une pente de 15% et 4 car postaux dans chaque sens qui le desservent chaque jour). J'ai suivi une formation accélérée d'infirmière à domicile, option "piqûres et pansements". Y a des impératifs. Disons qu'on a pas mal révisé notre conjugaison. Le lundi après l'opération, le téléphone a sonné: la maîtresse de Platinum, qui s'était entaillé le genou. Peut-être qu'à une autre période, je serais descendue le chercher pour m'assurer qu'il ne fallait pas faire des points. Là, j'ai cautionné la solution "stéri-strip et on verra plus tard". Parce qu'avec l'impératif imparfait à gérer, sur ce coup-là j'ai inventé l'impératif relatif.

mercredi 21 août 2019

Time!

Ces jours-ci, j'ai l'impression d'être dans les gradins de Wimbledon et d'entendre l'arbitre de chaise dire "Time!" sans arrêt. On en avait pas vraiment pris conscience, mais le temps s'était un peu arrêté le 19 juin dernier, avec la libération des écoliers.

L'été c'est un moment particulier, où certaines obligations s'arrêtent purement et simplement: l'école, le foot, le ménage, la lessive, le repassage, la cuisine... On profite du beau temps, on se laisse vivre, on oublie l'horloge. Bon, quand on est pas prof, faut quand même retourner au boulot de temps en temps, mais le rythme est différent. On prend le temps de ne rien faire, on boit l'apéro et on tape dans les chips sans scrupules. On se couche tard, on se lève tard et on s'en fiche. On se repose de tout ce qu'on ne fait pas. Et puis arrive le moment où l'arbitre crie "Time!"

Time! Les enfants, on charge le sac sur le dos et on y retourne. A 7h05 faut être parti pour ne pas rater le car. Hop hop hop, un bol de céréales, la douche et départ. Cette année, la rentrée était un peu spéciale: c'est la dernière année d'école obligatoire (11e) de l'ado, c'est le passage à la "grande ville" pour le préado (9e), c'est même le passage en 2e cycle (5e) pour Platinum. Finis les horaires écourtés des petits. Et je pense que c'est aussi la dernière fois où je suis allée dans la cour d'école le jour de la rentrée. Prise de scrupules, je me suis dit "non mais tu peux pas laisser ton petit aller en bus le jour de la rentrée, le bus est toujours vide, ça fait vraiment la maman qui s'en fout, et puis il pleut des cordes", alors j'ai pris la voiture et je l'ai amené; et en passant à l'arrêt du bus, celui-ci était déjà garé, il y avait 2 enfants dedans et un 3e qui allait y monter. Alors l'an prochain, c'est sans scrupules que je rejoindrai le clan des mères indignes, il semble que dans mon hameau, il compte déjà un effectif certain.

Quand tu as des enfants petits, la rentrée, c'est une sorte de moment magique, entre réjouissance et appréhension, une étape qu'il ne faut pas louper. Tu prends des photos, tu filmes, tu fais des petits signes et tu continues de murmurer des trucs à ton petit - et en articulant bien pour qu'il puisse lire sur tes lèvres s'il n'est plus à portée de voix. Ton gosse se retourne en ravalant ses larmes et te fait coucou 50 fois. Et puis un jour, ton enfant n'a juste plus besoin de toi. Un jour, tu es là, dans la cour, et tu te demandes un peu ce que tu y fais. Le cercle des copines-du-café-de-la-rentrée, en perpétuelle mutation, est en voie de désintégration. Il y a toujours des parents au café, mais ce ne sont plus ceux des camarades de tes enfants, ce sont ceux des petits qui viennent de franchir la porte les larmes aux yeux en se retournant et en faisant coucou 50 fois. Les grands n'ont plus besoin d'avoir leurs parents à la rentrée, les mamans augmentent leur temps de travail. L'an prochain, je resterai chez moi.

Time! Finies les soirées jeu ou télé, les devoirs ont repris. A caser entre le retour de l'école et l'entraînement de foot. Se familiariser avec son horaire pour profiter du fait qu'on a 3 jours pour le devoir d'allemand. Appeler maman pour qu'elle vienne aider au devoir de maths:
- Maman, les divisions de fractions, c'est déjà comment, je me souviens plus moi, ça fait aaaaaaaaaau moins 2 ans que j'ai pas fait.
- Euh moi ça doit faire dans les 25 ans, mais on va se débrouiller...
Et tu prends, tu retournes, tu simplifies, tu vérifies à la calculatrice que t'as pas complètement dit n'importe quoi. Tu te débrouilles. Mais tu demandes quand même "T'as pas plutôt besoin d'aide pour l'allemand?"

Time! Reprise des entraînements, donc reprise du taxi foot. La tronche du plan horaire des soirées fait 20 fois plus peur que le programme "2h de français, 2h de maths" du jeudi. Des entraînements tous les jours, qui débutent et se terminent parfois à 30 min d'écart, juste pour rire. Jonglage semestriel avec les horaires de bus, inscription à l'étude, répartition équitable des trajets entre le chauffeur numéro 1 et le chauffeur numéro 2, en tenant compte des obligations régulières et ponctuelles de chacun. Le jour où j'ai envie de postuler à un emploi de responsable RH, je pense que mon expérience dans la planification des ressources dans la catégorie "transport" de l'organisation familiale sera un atout incontestable.

Time! Reprise du sport. Hier, le coach a dit "les courbatures, c'est les muscles de demain". Vu mes douleurs ce matin, je devrais avoir le popotin de Jennifer Lopez sous peu. Je vous tiens au courant.

Time! Pour ce blog, auquel j'ai une fois de plus consacré trop peu de temps ces derniers mois. L'Etat du Valais m'offrant une matinée de plus sans enfant à occuper à partir de cette année, je compte bien en profiter pour écrire plus régulièrement :-) J'ai même inscrit une mention "écriture" dans un de mes plannings. Reste à voir si je suis aussi efficace à la réalisation qu'à la planification!

Bonne année scolaire à tous!

lundi 6 mai 2019

Deux pour le prix d'un

Avoir des jumeaux, c'est difficile. Parce que quoi que tu fasses, tu dois toujours le faire pour deux. Donc fatalement, ça prend plus de temps, plus d'énergie, c'est plus dur. Les mamans de jumeaux sont donc des doubles wonderwomen. Je leur signifie ici toute mon admiration et leur transmets toutes mes félicitations. Mais je me dois quand même de rétablir une vérité qui leur est inconnue: être maman d'enfants rapprochés (disons 3 sur 5 ans - toute ressemblance avec un gang existant étant purement fortuite), c'est pas non plus la panacée. Attention! L'idée n'est pas de faire un concours pour déterminer qui a objectivement les difficultés les plus grandes à surmonter, mais juste de dire que ton utérus n'a pas besoin d'avoir été un haut lieu de cohabitation pour avoir quelques défis parentaux à affronter. En vrai, t'as même pas besoin d'en avoir 3 en 5 ans. Ni même d'en avoir 3. Si j'étais nullipare, je dirais même chapeau bas à toute femme qui a le courage de se lancer en toute innocence ou en toute ignorance dans la parentalité. Mais dans mon cas, ça ferait un peu prétentieux. Ou ça donnerait l'impression que je regrette. Que nenni. Mais facile, c'est pas.  

Attention spoiler: la vie de famille ne s'assimile pas tous les jours à la mélodie du bonheur, avec des enfants parfaits qui courent dans la joie et la bonne humeur dans une verte prairie où paissent d'adorables licornes, avec des chants d'oiseaux en bruit de fond.

Déjà, chez nous, les vertes prairies, c'est généralement tondu à ras et orné de lignes  blanches (cf. l'article Tribulations de maman  foot). Quand t'as trois garçons,  les licornes, tu oublies. Bon y a parfois (souvent?) des chèvres  sur le terrain, mais z'ont pas quatre pattes.

Pour en revenir à la difficulté d'avoir des enfants rapprochés, ce qui est difficile c'est que dès que l'un sort d'une phase compliquée, le suivant y entre. Ca a commencé avec les couches: t'as pas le temps de te réjouir que ton premier-né trouve des avantages au pot que toi, tu es à nouveau occupée avec des fesses emplâtrées d'un truc jaunâtre à la consistance louche après chaque tétée du deuxième. Quand le deuxième arrête de s'esquinter les genoux 6 fois par semaine, c'est le numéro 3 qui refuse obstinément de lâcher ton doigt pour aller découvrir le monde et te laisser siroter ton apéro tranquille. Pareil pour les grasses mat' ou les poussées dentaires. Des fois, la simultanéité semble donc représenter un certain avantage. C'est double dose, mais ça dure moins longtemps. Et là, je signerais bien pour raccourcir un peu la période "âge bête", parce que si j'ai bien calculé, entre les 12 ans du premier et les 19 ans du 3e, on y aura consacré plus d'une décennie à cette histoire. La phase une étant déjà bien installée, on aimerait bien que la phase deux ne soit pas trop pressée de démarrer... Mais mes incantations ne sont pas entendues, et mes cheveux blanchissent déjà à l'idée qu'on va pas pouvoir couper à un troisième round, qui va débuter avant qu'on en ait totalement terminé avec le premier. Psychologiquement, c'est un peu quand tu as l'impression de souffrir depuis des heures et qu'une sage-femme te dit que tu es dilatée à 3: tu morfles déjà et pourtant t'as pas encore fait le tiers. Pis pas sûre que l'âge bête de ton 2e enfant ce soit comme sa naissance, plus facile et plus rapide parce que "le passage est fait".

Donc là, depuis quelques semaines que l'ado en pleine effervescence dont j'ai parlé précédemment semble connaître - contrairement à la météo - une période de léger redoux, le préado montre des signes de bouleversement hormonal. C'est encore plus troublant quand c'est à un enfant au caractère facile que ça arrive. Secrètement, je devais espérer que la malédiction hormonale glisse sur lui sans réussir à en prendre possession. Mais c'est loupé: il passe de l'agneau au loup, exprime l'injustice crasse de n'être ni l'aîné ni le petit dernier, alterne entre l'enfance insouciante où l'on ne pense qu'à jouer et l'adolescence ennuyée, blasée, déprimée et fatiguée où l'on ne décolle plus du canapé. Difficile de savoir à quel moment de la journée le vent va tourner. Ca surprend presque tout le temps. Un moment de parfaite harmonie fraternelle peut d'un claquement de doigts virer au drame familial, sous le coup de la crise existentielle de l'enfant brimé et mal aimé.  Une sorte de réminiscence du Terrible Two, mais qui a tendance à énerver davantage parce qu'on avait l'impression jusqu'il y a peu d'avoir des échanges entre alter ego.

Heureusement, cette perception adolescente totalement arbitraire et souvent faussée nous vaut aussi de bons éclats de rire. Non parce qu'on en sort souvent des vertes et des pas mûres sur les femmes enceintes, mais un enfant affichant en principe toute la maturité de ses 12 ans qui fond soudain en larmes de n'avoir pas pu casser le lapin en chocolat, ça vaut bien quelques envies étranges. Je repense aussi à ce petit déj à l'hôtel où, piqué par je ne sais quelle mouche matinale, le préado revient à table, l'assiette vide en dépit du buffet 4 étoiles, clamant haut et fort qu'il y a "tout ici, sauf ce qu'on veut pour déjeuner". Pour l'instant les crises passent vite, il faudra voir si c'est un effet positif du caractère d'origine ou si c'est parce qu'on est en début de processus. Si c'est une question de caractère de base, il va en fait falloir profiter de la phase deux, parce qu'entre le numéro 1 plutôt taciturne et renfrogné de naissance et Platinum qui ne se caractérise pas franchement par son calme et son humeur égale, les sursauts hormonaux du préado risquent bien de représenter davantage une bouffée d'oxygène qu'un gros souci.
Mais si dans les prochaines semaines ça ne devient plus gérable, j'ai caché un ou deux lapins à casser en cas de crise. Pas pour lui donc, pour moi. A défaut de calmer les sautes d'humeur, autant assurer son taux de dopamine.

mercredi 1 mai 2019

Sur un air de Berger

Y a comme un goût amer en nous
Comme un goût de poussière dans tout
Et la colère qui nous suit partout


Il y a ce nœud dans la gorge, qui remonte jusqu'au bord des yeux. À cause du calendrier, juste ça. À cause des souvenirs. 10 ans. Une éternité et un fragment de seconde tout à la fois.
10 ans qu'on n'entend plus ta voix, ton rire, et qu'on refuse de laisser leur souvenir s'estomper. Le deuil est un processus paradoxal où la volonté de voir la peine s'atténuer est en lutte constante avec la peur de l'oubli. Garder les bons moments mais oublier un peu quand même, la douleur, la peur, l'impuissance, le déchirement.

Y a des silences qui disent beaucoup
Plus que tous les mots qu'on avoue
Et toutes ces questions
Qui ne tiennent pas debout


Aujourd'hui il faut des jolis souvenirs. Il faut entendre ton rire, revoir ton visage, se rappeler les moments partagés, les fêtes, ou ta fierté de devenir tonton. Se souvenir de ce jour où, accoudé à un bar, tu m'as dit "je crois que c'est Elle, je crois que c'est la bonne". Sans le savoir, tu avais trouvé Celle qui serait assez forte pour marcher à tes côtés et te soutenir, pour le meilleur et pour un pire bien trop prématuré.

Évidemment
Évidemment
On danse encore
Sur les accords
Qu'on aimait tant

Aujourd'hui beaucoup auront une pensée pour toi et l'envie de dire qu'on ne t'oublie pas. Tu es dans chaque coccinelle, dans chaque "heure des anges", dans chaque étoile de chaque ciel dégagé. Tu es là, invisible et pourtant si tangible pour qui a envie de sentir ta présence, et malgré l'amertume nous  évoquons souvent une petite habitude, une mimique, un expression... Je crois quand même que "Du lachst, oder was?" aura du mal à passer à la postérité, il faut croire que le monde n'était pas prêt pour ta sublime traduction.  

Évidemment
Évidemment
On rit encore
Pour des bêtises
Comme des enfants
Mais pas comme avant

Aujourd'hui, j'ai envie de te dire regarde, on a tenu le coup. Tu nous as bien protégés, même si c'était parfois contre notre gré... Et puis, tu ne t'étais pas trompé, c'était Elle, Celle qu'il fallait pour porter votre famille à bout de bras après ton départ, pour élever ce fils qui a ton regard et cette puce qui sera aussi espiègle que son père, pour leur transmettre tout l'amour que tu aurais continué à leur donner. Mais au fond je crois que tout ça, tu le sais, tu le vois, que tu partages nos moments de joie et que quand l'un de nous perd pied, tu ne te gênes pas pour nous lancer de là-haut "Tu ris, ou quoi?"

Tu nous manques Seb.

lundi 8 avril 2019

Tribulations de maman foot

Le foot, c'est fatiguant.
Je parle pas des 90 minutes, avec les quelques variations de durée rencontrées au fil de l'alphabet, j'ai jamais joué un match de ma vie. Mais j'ai trois garçons. Qui font du foot. Et des fois, ça me fatigue, mais alors d'une force...

28 buts encaissés pour 2 buts marqués. Ca fait 48h que je répète ce peu glorieux bilan du week-end de foot à qui veut l'entendre. C'est qu'un jeu, y a pas mort d'homme. N'empêche. Quand ton tout petit (bon OK, il a 11 ans et demi et des sursauts hormonaux qui laissent présager le pire pour les 7 ans à venir au moins, mais vu du bord du terrain devant son grand but, il est tout petit), gardien de son état, se fait fusiller pendant 3 x25 minutes tandis que les 8 braves qui portent les mêmes couleurs que lui n'arrivent pas à dépasser le milieu de terrain, ça fait un poil mal au coeur. Ca fait un poil froid aux feuilles et aux petons aussi, quand ça se passe le vendredi soir après la tombée du jour. C'est pas l'heure et quart qui marque le week-end de toute sa positivité quoi. Cela dit, 15 buts encaissés en 75 minutes, ça fait jamais qu'un but toutes les 5 minutes et quand même 60 minutes où il n'a rien encaissé. En vrai, le verre est donc à 4/5 plein, que demande le peuple?

Après, il y a le traditionnel match du samedi matin, parce que les plus petits, ils jouent presque systématiquement le samedi matin. Je pense que c'est parce que ceux qui font les calendriers, ils savent que les petits, ça fait pas la grasse mat, ça regarde pas Kho Lanta la veille, et ça ronchonne pas quand maman vient les lever un samedi à peine plus tard qu'un jour de semaine pour descendre au terrain. Ce samedi, normalement Platinum avait congé. Mais comme j'ai déjà de la peine à le faire dépenser son quota d'énergie quotidienne quand il a match, sans ça il est intenable (et du coup il cause deux fois plus), alors on l'a envoyé faire le nombre avec une autre équipe, même endroit, même heure. Pris 8 à 2. Un match de juniors E, 3e degré, des fois t'es déçu en bien. Des fois t'es pas déçu: y a une bonne dizaine de gamins sur les 14 en jeu qui courent derrière le ballon en mode essaim d'abeilles, 2 qui cueillent les pâquerettes qui ont échappé à la tondeuse automatique, un qui fait coucou à maman-qui-filme et un qui court dans le sens inverse de la marche. Vivement que Tintin nous ait posé son synthétique, on récupérera l'attention de 2 joueurs par match. En général y en a quand même un, souvent plus petit que les autres, qui court dans tous les sens, est sur tous les ballons et fait des trucs bizarres avec ses pieds, des trucs qui marchent. Et tu te dis que celui-là, c'est plutôt un que notre petit club régional va se faire tauper avant qu'il ait le temps de gravir les échelons alphabétiques. Bon le boueb survitaminé et plutôt agile (je précise que c'est pas le mien, qui ne sait pas faire aussi bon usage de son énergie intarissable), il a pas suffi sur ce coup-là. Donc 8 à 2. L'avantage du match du samedi matin, c'est que ça finit pile poil à l'heure de l'apéro et que si t'as des amis ou des parents dans l'enceinte, tu peux même boire un coup de blanc pour oublier la défaite (si t'es tout seul tu peux aussi, mais ça nuit un peu à ta réputation). Mais pas trop longtemps l'apéro, parce que le nombre de rounds est proportionnels au nombre de gamins que tu as. Donc à 12h faut être à la case pour récupérer l'ado-qui-a-match-plus-tard, mais dont l'entraîneur a jugé qu'il fallait manger ensemble pour la cohésion d'équipe (enfin j'imagine que c'est un truc comme ça) et qui, de ce fait, écourte donc ton apéro sans le moindre scrupule.

Alors tu rentres, tu poses un, tu ramasses l'autre, tu embarques deux copains en chemin, tu déposes chez Tonino pour les pâtes, et tu remontes signaler à ceux qui ont déjà eu leur match hebdomadaire que les linges n'ont pas une option d'auto-étendage et que les chaussures de foot qui puent des pieds sont toujours interdites de séjour dans la maison. T'avales un truc pas sain en vitesse et tu repars pour le dernier round.

Un match d'ados en filière sport-études, au niveau de l'intérêt footballistique, c'est mieux. Mais ça peut aussi partir en couille. Déjà, quand tu viens voir ton gamin, mais qu'il passe les 2/3 du match sur le banc, y a une pointe de frustration qui te parcourt les tripes. C'est pas grave en soi, c'est juste que si t'avais su, tu aurais peut-être retardé un peu ton départ pour le terrain. Quand on me dit "mais t'aimes le foot?", je réponds que j'aime surtout mes enfants. Donc s'ils faisaient de la lutte gréco-romaine, j'irais voir de la lutte gréco-romaine. Et je hante rarement les terrains de foot où je n'ai pas un enfant qui joue. Bref, 60 min à voir l'ado se rabougrir sur son banc avec son chasuble de remplaçant et à savoir que le samedi finirait probablement dans une ambiance aussi morne que celle du vendredi soir. Bon, là aussi, y a moyen de boire l'apéro après. Sauf que l'ambiance au bord du terrain n'est pas tout à fait aussi bon enfant que celle du matin, où les parents filment l'essaim d'abeilles. Là, c'est la "promotion de la relève", la future "élite". Alors les parents sont un poil tendus. Enfin sauf moi et mon fils en chasuble. Mais les esprits s'échauffent, parce qu'untel a fait une erreur, qu'untel autre a vendangé alors que l'ouverture du score semblait inratable. Et puis ça parle fort, ça se met à critiquer l'arbitre qui ne semble pas tout à fait objectif quand un Neymar en puissance hurle au scandale et obtient une faute, puis une autre, puis un pénalty... puis un deuxième pénalty... Pas de vidéo, juste un être humain, qui s'est peut-être planté, ou pas. Mais ça gueule salement, les noms d'oiseaux volent. Les parents se brouillent même entre eux, entre les plus fâchés et les plus tempérés, les deuxièmes essaient de calmer les premiers et se font insulter à leur tour. C'est à qui connaît le mieux le foot et à qui ferait mieux de se taire. C'était un derby, "notre" équipe a pris 5 à 0 et on avait même plus envie de boire l'apéro.

Après ce petit récit du week-end, peu de gens me reprocheront de dire que le foot, ça me fatigue. Peut-être même que sans le vouloir, j'apporte un peu d'eau au moulin de ceux qui le diabolisent, refusant obstinément que leur gosse s'abaisse à pratiquer ce sport. Alors je ne terminerai pas sans dire qu'en dépit de ce week-end un peu pourri, il y a aussi plein de chouettes moments de convivialité et de bonne humeur. Il y a surtout ces enfants qui demandent "tu viens me voir?" et s'assurent ensuite qu'on n'était pas trop pris par une conversation et qu'on n'a pas manqué l'action de la 24e minute ou le but marqué. Il y a des enfants, petits, moyens et grands qui sont dehors et qui font du sport, qui partagent des moments de vie, expérimentent les joies de la victoire et versent parfois des larmes de déception, qui prennent des coups et se relèvent, qui apprennent à vivre ensemble et qui ressortent grandis de chaque expérience. Ce n'est pas l'apanage du foot, mais ça en fait indubitablement partie. Alors non, je n'ai pas une passion irrépressible pour le ballon rond, et certains jours, j'en ai marre; mais je continuerai de faire le tour des terrains du Valais et d'ailleurs pour encourager mes enfants à poursuivre cette aventure.

vendredi 11 janvier 2019

Plein l'(a)dos

13 ans. Jamais aimé cet âge. Je me souviens de l'appareil dentaire, des problèmes de peau et de ce vague sentiment de nager entre deux eaux. Du coup je pensais être en mesure de comprendre, de réagir le plus adéquatement possible. De ne pas être une maman d'ado qui parle d' '"âge bête". Foutaises! On est tous passés par là, mais ça ne nous rend pas plus aptes à gérer quand on est dans l'autre camp. J'ai l'impression de savoir ce qu'il ne faut pas dire, mais bon sang, qu'est-ce que j'ai envie de le dire quand même!

Je me souviens aussi comme j'en ai soupé, quand j'étais maman-d'enfants-en-bas-âge, du dicton "petits enfants, petits soucis, grands enfants, grands soucis". Franchement, quand tu dors 4 heures discontinues de la nuit pour te faire uriner/vomir/hurler dessus par un petit être diabolique, tu te dis que ça ne peut décemment qu'aller en s'arrangeant. Détrompe-toi. Désolée, mais là aussi, je suis passée dans l'autre camp. Celui où ton souci n'est plus de savoir jusqu'à quelle heure tu vas pouvoir dormir, mais d'espérer (prier? rêver?) que ton rejeton trouve ce qu'il va faire de sa VIE. Et ça, crois-moi, c'est fichtrement plus angoissant. Non, parce qu'un ado, c'est pas un être humain normal. Un ado, ça n'a pas d'envies, de passions, de motivation à se lever le matin. Ca a besoin de temps pour pousser, tranquille, dans son coin, et quand tu l'as bien laissé faire, tu te retrouves à commander des chaussures sur Z*** dans des tailles même trop grandes pour le chef de clan, des pantalons de training parce que la seule motivation qui subsiste ça reste le sport, et des pulls à capuche parce que de toute façon si tu tentes de planquer autre chose dans son armoire en douce, ça y restera jusqu'à ce que ça ne lui aille plus. Donc non seulement ça file des cheveux blancs, mais en plus ça coûte un bras et demi, parce qu'une fois qu'il te dépasse, tu te fais une raison sur le fait d'arrêter de cliquer sur l'onglet "Enfants" avant d'entamer tes recherches sur les sites de vente en ligne.

Je me plains par principe (et suite à une prise de bec pré-choix professionnel), tout en mesurant ma chance d'avoir un ado qui bosse encore à l'école et qui a quand même un semblant de début d'idée de ce qu'il va faire de sa peau dans les années à venir. La vérité, c'est surtout que les enfants grandissent et que s'ils prennent moins de place au niveau jouets (et je ne profite pas encore totalement de cet avantage, Platinum ayant décidé, du haut de ses 8 ans, qu'il était encore bien trop petit pour cesser d'envahir le salon avec des Playmobils), ils en prennent de plus en plus dans l'organisation familiale. A chaque étape de leur vie, ils s'affirment en tant que personnes ayant leurs activités, leur vie, leurs amis, leurs obligations, et force est de constater qu'en tant que parents, nous ne pouvons plus les traîner partout et devons aussi nous adapter... Ils gagnent en autonomie, mais en habitant dans un endroit mal desservi par les transports publics, autonomie rime aussi souvent avec taxi. (Vous la sentez, là, la déprime qui sous-tend due à la réception du "planning" foot du printemps, printemps qui commence par des matchs de préparation LE 2 FEVRIER??)

L'adolescent est un interlocuteur difficile, non seulement parce qu'il n'a pas franchement envie de parler (en tout cas le nôtre), mais aussi parce que face à cette boule d'hormones, il n'a jamais été aussi compliqué de trouver le juste milieu entre la compréhension et les reproches, le laxisme et l'autoritarisme, la tolérance et l'intransigeance. Être parent d'un adolescent, c'est plus que jamais se remettre en question sur l'adéquation de ses réactions, sur le bien-fondé des règles établies. C'est marcher en permanence sur l'arête d'une montagne, avec sur votre droite l'option "vous avez été trop cool, votre ado est certes très heureux de son confort, mais il va en profiter pour rien glander de sa vie/devenir dépendant aux jeux vidéo/arrêter sa formation avant la fin/faire des crasses avec ses copains désoeuvrés/finir en prison/vivre à vos crochets jusqu'à 45 ans" et sur votre gauche "votre enfant a certes été bien éduqué, mais c'est un être brimé, meurtri, qui en fait vous déteste". L'aptitude d'un ado à vous faire croire que vous allez tomber vers la gauche est considérable.

Et puis il y a la société et le monde 2.0 qui ne nous aident pas forcément à trouver les options adéquates. Les fast-foods poussent comme des champignons, mais il ne faut pas céder à la malbouffe; faut boire de l'eau du robinet, bon y a un chouïa d'arsenic dedans (mais l'arsenic ça débouche aussi bien les tuyaux que le coca?); les écrans c'est tabou, on en viendra tous à bout, mais "tu t'inscriras à la séance d'information directement sur le site", "l'heure du rendez-vous sera précisée par Whatsapp" etc. Et dans ce tourbillon d'informations contradictoires, nous autres parents, on essaie d'élever des enfants qui arrivent à se débrouiller dans ce monde-là sans tomber dans ses travers.

Voilà où en était mon dernier article-brouillon-depuis des lustres et demi. Et il serait peut-être (sûrement?) resté à l'état de brouillon encore quelques semaines/mois/années si je n'étais pas tombée sur un article d'une autre blogueuse disant que "fait vaut mieux que parfait" (et que vous pouvez retrouver là: https://fabuleusesaufoyer.com/fait-vaut-mieux-que-parfait/?fbclid=IwAR1p0xg3gjw7U0kYIIxe148VuNfojMBdcMwgDzivuQCBYdL8F7Lsd17G1KI)
. Alors il n'était pas très abouti, cet article, il est né et il a poussé étape par étape, mais au moins il est là, et ce soir, ça me fait plaisir de le publier.

Entre le moment où je l'ai commencé et ce 11 janvier, le temps a passé. Beaucoup de temps. Trop sans doute. On a changé d'année. Alors publier des articles imparfaits sera peut-être la seule résolution que je tiendrai, mais je vais essayer. Faut aussi que je pense à changer le titre du blog. Je sais pas comment elle sera, la quarantaine, mais elle s'en vient, alors si vous avez des idées...