Ce blog c'est...

Un peu de tout, de moi, de nous... A lire, à sourire, à commenter et à partager!

vendredi 24 avril 2015

On est jamais aussi heureux qu'à 33 ans

Voilà ce qu'affirmait un sondage paru dans le Femina au printemps passé. Ce qui peut être perçu comme une bonne nouvelle pour tous ceux qui sont nés en l'an de grâce 1982. Ou plus tard. Ceux-là ont soit une belle année à savourer, soit la réjouissance de voir arriver le bonheur à plus ou moins long terme. Pour les autres, désolée, sortez les mouchoirs, vous êtes "data". Tout de suite moins sympa, le sondage. M'est d'avis que Femina risque de perdre quelques lecteurs. Ou pas. Parce que je suis moi-même dans le camp des data du bonheur; pourtant j'ouvre toujours le magazine le dimanche matin.

Il est tout de même légitime de s'interroger sur la nature du panel interrogé pour ce sondage. Je sais pas vous, mais moi les 52 dimanches matins qu'a comptés ma 33e année, lorsque j'entrouvrais l’œil droit et me retournais en feignant de n'avoir entendu ni les sauts de cabri de Blondinet Ier et de Blondinet II sur le parquet du rez, ni les appels insistants de Blondinet III à l'étage inférieur, je ne me sentais pas spécialement enviée par ma progéniture. Il me semble que les mômes, ils ont fichtrement moins de soucis que nous, quand même. C'est vrai, quand tu en vois un déguisé en Peter Pan, luttant contre un Capitaine Crochet imaginaire, l'autre dégustant le 12e bonbon du sachet reçu à l'anniversaire dont il vient de rentrer et le 3e fredonnant "Au clair de la lune" en faisant des aller-retour sur une petite voiture en plastique, tu te dis que leur degré de bonheur ne doit pas être très éloigné de l'apogée où toi, du haut de tes 33 ans, tu es censé te trouver. S'ils n'ont pas la satisfaction d'une vie bien posée, ils ont une insouciance qui semble des plus enviable. Conclusion: Femina n'avait pas interrogé les 0-8 ans pour son sondage.

Toujours est-il que le bonheur est finalement une notion subjective, si ce n'est pas carrément une vision de l'esprit. Tandis que le schéma métro-boulot-dodo conjugué à l'image enfants-maison-chien apparaîtra à certains comme le cauchemar ultime et le signe tangible de la fin de la jeunesse, il semblera à d'autres être simplement le symbole de la stabilité, de la sécurité, de ce que finalement tout adulte posé cherche à obtenir. Et le bonheur dans tout ça? Comment le définir? On sait tous que l'argent ne le fait pas... Mais ne manquer de rien contribue quand même à supprimer les frustrations. On sait tous que le bonheur absolu n'existe pas non plus. Le bonheur global se compose d'une multitude de petits bonheurs, de moments privilégiés où l'on ne se dit pas "si seulement".

Si tu es attentif, Ô lecteur, et si en plus te me connais hors cadre virtuel, tu sais que je n'ai plus 33 ans depuis belle lurette. La vérité, c'est qu'en cet après-midi ensoleillé de fin avril 2015 (je précise, au cas où Blogger me jouerait un mauvais coup et publierait la date à laquelle j'ai vraiment commencé cet article), cherchant désespérément une énième bonne excuse pour me détourner de mes documents ouverts et "à traduire" (pour un total de 326 pages), j'ai cliqué un peu par hasard sur le lien de mon blog. J'y ai trouvé 16 articles, dont 3 au statut de brouillon. J'ai vu la date de ma dernière publication: 23 avril 2014. J'ai entendu ma belle-sœur, qui, un jour de neige, m'a laissé entendre qu'elle était revenue sur mon blog et que ça ne débordait pas d'activité. J'ai eu honte, non plus de ma fainéantise momentanée face à mon volume de travail, mais de mon "oubli" de faire quelque chose que j'aime tant, et depuis si longtemps. Ecrire. J'ai réfléchi un peu, à ce que j'avais envie d'écrire. Des trucs plutôt drôles. Des trucs plutôt pas. Un peu de tout, finalement. Et tourmentée par ce joyeux foutoir cérébral, j'ai cliqué sur l'un des brouillons et suis retombée sur le délire des 33 ans. Cela fait maintenant quelques mois que je suis plus près des 40 que des 30. Je ne me sens toujours pas moins heureuse qu'à 33. Je m'habitue aux pattes d'oie au coin des yeux. Le bonheur, on peut le trouver dans le chant d'un oiseau à 6h du matin, un rayon de soleil taquin qui vient nous chatouiller les orteils qui dépassent de la couette (oui oui, tu lis bien, 6h et des brouettes en avril, chez moi c'est un peu le Japon du Valais). Dans une tulipe qui s'ouvre pour prendre son bain de chaleur et se referme au couchant. Dans le fumet de l'herbe fraîchement coupée ou de la côte de bœuf sur le barbecue. De même, on peut avoir tout ça sous les yeux et tout d'un coup, ne plus réussir à le voir. On peut être agacé par un enfant qui rit parce qu'on a un besoin irrépressible de silence. On peut se mettre à crier ou à pleurer sans raison. On peut ne plus trouver d'énergie pour se lever le matin et simplement vivre la vie qu'on a pourtant choisie. On peut ne plus avoir d'envies, de rêves, de plaisirs, sans même savoir pourquoi, et ça peut faire mal. Des causes, il y en a, bien sûr, le travail, la fatigue, les soucis du quotidien, le mode de vie du 21e siècle. Et peut-être surtout le fait de s'oublier au milieu de tout ça, en tant qu'être humain, avec ses forces mais aussi avec ses faiblesses, à force de vouloir renvoyer l'image d'un super-héros présent sur tous les fronts. Les super-héros, ça se prend parfois les pieds dans la cape.

Alors cet après-midi, même si certains ne comprendront peut-être pas que je trouve le temps d'écrire tout ça tandis que mon dossier à traiter déborde, je fais la sourde oreille au gyrophare virtuel qui tourne dans mon échéancier pour me rappeler que je suis à la bourre et que je vais vraiment finir par être en retard, et je me fais une petite piqûre de rappel, histoire d'aider un peu ma cape à flotter au vent. Je laisse de côté le travail, la fatigue, les soucis du quotidien, et j'écris. Parce qu'on est jamais aussi heureux que dans les moments où on fait ce qu'on aime vraiment.