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dimanche 31 mai 2015

Dans le port...

Il y a des endroits où l'on ne peut s'empêcher de fredonner une chanson célèbre. Je me suis ainsi retrouvée à arpenter les rues de Paris en cherchant les noms des rues de la Place des Grands Hommes (si quelqu'un doute encore de la pérennité de ma passion bruélienne, qu'il en profite pour relire  l'article Paléo time de la catégorie Spectacles et sorties - et hop vas-y que je te fais un petit coup d'autopromo vantant la super-nouvelle organisation de mon blog, d'ailleurs, vous avez vu que je lui avais fait un petit relooking printanier? non parce que je me donne du mal pour vous quand même!), à chanter du Thierry Hazard dans le brouillard londonien. Vaut mieux pour ces pauvres Irlandais que je n'aille pas tout de suite visiter les lacs du Connemara, l'hymne de Sardou ayant déjà traumatisé bon nombre d'Autrichiens (c'est une longue histoire que j'aurais beaucoup de plaisir à raconter, mais ça remonte à 15 piges, ma mémoire affirme qu'il y a indiscutablement prescription). Bref, je m'égare, revenons plus au sud - mais pas de beaucoup.

Ce printemps a été l'occasion d'une nouvelle escapade entre filles. Cette année, Amsterdam pour ces dames. Quand on dit qu'on part en week-end à Amsterdam, les gens vous imaginent tout de suite en train de parcourir les rues aux vitrines douteuses, slalomant entre les péripatéticiennes et les vendeurs de substances psychotropes, un pétard dans une main et une Heineken dans l'autre. Il est donc grand temps que quelqu'un explique qu'Amsterdam, ce n'est pas forcément ça.
Tout d'abord, même si on s'escrime pendant 3 jours à rechercher la première phrase de la chanson (qu'on ne retrouve pas sans tricherie googlesque éhontée), s'il y a bien une chose qu'il n'est pas nécessaire d'aller voir dans la capitale batave, c'est son port. Par contre, parcourir un bout de ville sur un bateau-mouche, une péniche, un pédalo ou un paddle board (si si,  on en a vus!), c'est agréablement bucolique. La présence même des canaux est des plus relaxante et confère à la ville une atmosphère d'une grande sérénité. En trois jours, nous n'avons pas vu de gens courir comme pour rattraper le temps, impression récurrente - et bien triste - que l'on peut avoir dans d'autres capitales. Le moyen de transport amstellois par excellence, c'est le vélo. Mais attention: pas un vélo au sens où on l'imagine dans nos contrées montagneuses où tu as pour option le vélo de course pour jouer les Christopher Froome de seconde zone ou le VTT-tout-suspendu indispensable aux cinglés du Grand Raid, non, un vélo au look improbable, équipé d'un panier ou d'un porte-bagage à l'avant, qui mise tout sur son aspect pratique. Un peu la version pour adulte du vélo avec guidon coudé Barbie que tu rêvais d'avoir à 6 ans mais que tu aurais eu fichtrement la honte de monter à 14. Ben là-bas personne n'a honte, tout le monde a plus ou moins le même, avec en guise d'ornement une chaîne-cadenas qui entraînerait probablement le cycle au fond du canal si son conducteur quittait la route au mauvais endroit par suite d'une absorption excessive des substances légales mentionnées plus haut. Tout ça pour dire, qu'à Amsterdam, le vélo est roi, à tel point que quand tu te balades à pied, tu échappes bien plus de fois par jour à la mort par percussion cycliste qu'à des accidents imputables à l'inadvertance d'un conducteur automobile. Cette préférence en matière de moyen de locomotion évite au touriste d'inhaler trop de gaz d'échappement (ça doit être pour compenser ce qu'il inhale sur les terrasses des coffee shops), et puis même s'ils font comme chez eux, ces cyclistes, une sonnette de vélo sera toujours moins agressive que les klaxons romains.
En termes de gastronomie, les guides et autres ouvrages de conseils pour aventuriers du dimanche (ceux qui préfèrent la valise à roulettes format bagage de cabine - dans laquelle tu arrives encore à glisser ton sac à main au moment de l'embarquement où l'hôtesse te fera immanquablement remarquer que tu n'as droit qu'à UN bagage - au sac à dos XXL, et l'avion de 6h40 à l'option combinée train de nuit/bus bondé/dos de mulet) recommandent de ne pas se faire trop d'illusions sur les spécialités néerlandaises, nous avons donc opté, avec une réussite certaine, pour des pâtes bien italiennes, des sushis bien japonais et de la viande de-je-sais-plus-où (pis à vrai dire, on a même mangé dans un bouib qui avait un nom assez vlaams et une carte sans nationalité précise, et on s'est régalées quand même ;). On a goûté du gouda par acquit de conscience, et ma conscience étant maintenant acquittée, je suis en mesure de vous confirmer que c'est pas bon. Niveau shopping, par contre, y a de quoi faire. Et les gens sont sympas. Nous n'avons pas été en mesure de définir s'ils étaient sympas juste avec nous parce que nous sommes nous-mêmes éminemment sympathiques et attachantes (ce dont aucun lecteur ne devrait douter) ou si tous les Néerlandais joviaux, accueillants et commerçants résident à Amsterdam et envoient tous les grossiers personnages en vacances (me dites pas que vous avez jamais eu dans un camping un groupe de Hollandais d'une discrétion toute relative, parlant dans une langue semblant conçue pour vous écorcher les oreilles autant que le haut-valaisan, à un volume sonore qui devrait être interdit par les gérants - non parce que vu tout ce qui est interdit dans certains campings, il ne serait vraiment pas abusif d'interdire le Dutch hein - un jour rappelez-moi de vous raconter à ce sujet la fabuleuse histoire d'Igor-d'Hossegor, le maître nageur castrateur exilé en Corse!). Bref, on s'est senties bien à Amsterdam. On a fait un bain culturel au musée Van Gogh, un bain d'histoire dans la maison d'Anne Frank, des bains de foule dans les rues pleines d'effervescence d'une capitale en week-end. Nous sommes rentrées heureuses (et propres, avec tous ces bains!) et amoureuses de la ville.
Mais nous n'avons pas été au musée du sexe. Parce que finalement, on s'en foutait un peu de cette attraction touristique-là. Les innombrables enterrements de vie de garçon et de jeune fille rappellent qu'on est dans une ville avec cet aspect qu'on ne trouve pas chez nous (quoique je suis sûre que moyennant une consommation de fendant suffisante, il ne serait pas impossible de rencontrer sur la place centrale une bande ou l'autre de donzelles portant sur la tête un cerceau orné d'antennes en forme de pénis). 
Nous n'avons pas donné la priorité au Red light District, parce qu'honnêtement, on a bien assez à faire avec le maintien acceptable de notre propre musculature fessière pour aller s'extasier sur celles exposées en vitrine.
Nous n'avons pas goûté les mets locaux les plus improbables, invariablement parfumés au cannabis, le doux fumet généreusement partagé par certains voisins de tablée en terrasse était suffisant.
Je viens de répondre aux trois questions qu'on m'a le plus posées ces cinq derniers jours; et malgré les réponses négatives qui ont eu l'air de faire naître le doute chez mes interlocuteurs quant au degré de divertissement de notre week-end, je peux vous garantir qu'Amsterdam promet un séjour inoubliable, même avec des aspirations différentes. Il y en a pour tous les goûts; allez-y en couple et placez un cadenas enamouré sur un pont; allez-y entre potes et mettez-vous sur le toit entre la brasserie Heineken et le Icebar; allez-y entre copines et faites chauffer la Visa dans Kalverstraat ... L'essentiel dans une escapade de ce genre, c'est avant tout d'y aller avec des personnes dans le même délire que vous.
De trois jours d'évasion, on garde des images de canaux, de ponts, de vélos, de rues entières, on garde des photos, plus ou moins réussies... Mais on garde surtout en mémoire les anecdotes qu'on essaiera de raconter ensuite tout en sachant que personne ne comprendra vraiment, les phrases cultes qu'on se répétera en riant aux larmes lors d'un prochain souper, ces moments et ces mots qui nourrissent une amitié... L'essentiel dans une escapade de ce genre, c'est ce que l'on vit ensemble autant que ce que l'on voit.

mardi 19 mai 2015

Appelez-la Madame

Jeudi 7 mai 2015. Nous sommes assis dans l'obscurité en attendant l'artiste. Musique entraînante, puis elle apparaît, vêtue comme à son habitude de noir, une combi qui lui va à ravir, un soupçon de transparence sur les flancs pour la féminité, sa coupe au carré qui a repoussé. Il faut une seconde à ce petit bout de femme pour envahir  l'immense scène et irradier de sa présence la salle gigantesque. D'accessoires, elle n'en a pas un; sa gouaille lui suffit largement. Florence Foresti se suffit à elle-même.

Pendant près de deux heures, elle nous régale de sa verve. Les bons mots et les vannes s'enchaînent à un tel rythme qu'on ne parvient même pas à les retenir. Après Mother Fucker qui présentait son expérience de la grossesse et des débuts de la maternité, elle nous parle de son "après". De la quarantaine abordée avec peu d'espoir et un cynisme certain, de la maternité version "enfant qui grandit" et des joies des devoirs, des autres mamans, forcément mieux organisées, plus performantes, meilleures mères qu'elle - elle considère elle-même qu'elle aurait fait un super papa, mais que comme maman, elle laisse à désirer. A titre personnel, j'ai l'immense privilège de me sentir visée par les vannes sur les mamans de famille nombreuse (c.-à-d. à partir de 2 enfants, selon la vision de l'humoriste), encore davantage lorsqu'elle parle des mamans de garçons, génitrices à succès. On sent que cette maman de fille unique a été égratignée par quelques remarques malvenues. Pour ma part, avec mes trois blondinets, je suis définitivement promue dans la catégorie des pondeuses d'élite. C'est de bonne guerre, Florence, la vie serait tellement moins drôle sans stéréotypes et idées préconçues. Si ça te rassure, même quand on atteint le stade ultime de la réussite procréatrice - les 3 garçons, donc - on se ramasse tout autant de remarques d'une pertinence toute relative (la palme étant attribuée à "va falloir faire un 4e pour tenter la fille" - euh ouais, ou pas quoi, j'ajoute des branches à mon arbre généalogique, là, je suis pas en train de jouer au casino...). Fallait que je le dise. Mais je vais tenter de rester objective malgré cette jalousie totalement justifiée à l'égard de mes trois jackpots dans la grande loterie de la conception.

Revenons à Florence. Je dirais que la justesse de ses réflexions et l'humour qu'elles recèlent feraient sourire un Saint-Hubert (mais si, vous savez, ces chiens qui ont l'air de porter toute la misère du monde sur leurs arcades sourcilières). Juste, c'est bien le mot qui convient: tout est juste. Un spectacle bien construit, dans lequel on ne perd pas le fil une seconde; un soupçon de caricature, bien sûr, parce que la "maman calme" n'est risible que si on augmente un peu le trait, des imitations brillantes, du guépard en pleine course (démonstration indiscutable du fait que l'homme n'est pas fait pour courir, qu'il faudrait que je partage à l'occasion avec certains joggeurs invétérés de ma connaissance) à une Vanessa Paradis plus vraie que nature (ou du moins plus marrante), un jeu de scène millimétré, où chaque pas devient un outil comique...

Et puis il y a le fond. La justesse des questions qu'on se pose sur la vie et ses différentes étapes, les réponses que sont susceptibles de nous apporter nos contemporains et nos aînés. La justesse d'un regard critique aussi, sur la vie, sur la société et ses usages actuels, sur nos modèles et ceux de nos enfants. Car elle est féministe, la Forest'. Elle s'insurge contre l'auto-dévalorisation de la femme, contre les starlettes en micro-tenue que le show-biz impose à nos adolescentes comme idoles. Son discours est plus efficace que n'importe quelle Femen sur la place publique. Mais ce qui est plus efficace encore pour défendre l'égalité des sexes, c'est sa seule présence sur scène. J'ai vu Jamel dans cette même salle; j'ai vu Gad il n'y a pas si longtemps. J'ai aimé aussi. Mais en sortant de l'Arena ce soir-là, j'avais le sentiment indiscutable d'avoir assisté au meilleur one-man-show que j'aie jamais vu. Alors si vous ne savez pas que faire en décembre, la jeune quarantenaire repasse par Genève. Allez la voir, à Genève ou ailleurs, que vous ayez quarante ans, ou plus, ou moins. Vous ne le regretterez pas. Et si par bonheur vous arrivez à obtenir un autographe ou un selfie avec l'artiste, dites-lui merci pour moi... et appelez-la Madame.