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dimanche 3 mai 2020

Semaines #6 et #7

Home (school), sweet home (school) - Suite et bientôt fin

Les vacances de Pâques ont passé comme une lettre à la poste. Coincées entre deux colis estampillés "école à la maison". On a versé une larme sur un séjour en Ardèche en famille élargie annulé, non mais en vrai ça aurait sûrement été nul d'avoir 4 jours off à faire du canoë avec une météo parfaite et des températures quasi estivales. Et puis au semi-confinement a succédé le semi-déconfinement, et certaines décisions pour les semaines à venir. On a pas fini de rire.

Revenons tout d'abord à ces deux semaines d'épanouissante continuité pédagogique. Il faut préciser que la reprise de l'école à la maison a coïncidé avec le lancement de la construction de nos futurs voisins et l'arrivée de Xavier et sa pelle mécanique de compète. Il n'en fallait pas plus pour détourner Platinum du droit chemin scolaire. Donc il est quelque peu indiscipliné depuis. Mais heureux. Au diable la discipline, donc.

Je n'ai toutefois pas renoncé à lui faire accomplir ses tâches en bonne et due forme. Ou presque. Disons que le rythme a tendance à ralentir au fil de la semaine et que le vendredi s'assimile souvent à une séance de rattrapage du journal de bord - qu'il n'a pas besoin de livrer tous les jours - et des "phrases du jour" dictées. Mais le job est fait.

J'ai renoncé à espionner les vidéoconférences, mon estime de moi-même s'en porte sensiblement mieux. Surtout que les deux dernières ont eu lieu à l'heure de l'apéro. J'ai pas osé demander un changement de groupe, mais honnêtement, le vendredi à 17h40, confinement ou pas, c'est quand même plus adapté à une happy hour chips et Spritz qu'à un créneau expression orale.

La prof d'ACM est toujours aussi motivée. Donc on sait tout sur le mandala et ses origines (oui oui, moi aussi, parce que je n'ai pas trouvé comment passer directement à l'activité à réaliser sans feuilleter les 8 pages du mini-site à lire avant) et sur le Land Art. Pour la partie pratique, j'ai sauté sur l'occasion pour forcer tout le gang à une petite descente au château (pour ceux qui ne visualisent pas notre havre de confinement, il est situé à une altitude de 850m, sur le même versant qu'une tour médiévale, qui se trouve plus ou moins à mi-chemin entre nous et la plaine, donc on descend au château, contrairement aux Martignerains qui y montent!) histoire de récupérer de quoi faire le mandala Land Art. Arrivés à la sortie du hameau (donc 3 min 30 de marche), le sac était déjà plein de trucs de toutes les couleurs, inutile de dire que les grands se sont vite réjouis de ne pas avoir à aller jusqu'à l'objectif final, 200 m de dénivelé plus bas. C'était mal me connaître, je n'ai pas lâché le morceau en vantant l'amusement indéniable d'une super partie de cache-cache autour du château. Sauf que quand on est arrivés, tout était bouclé, évidemment (ou quand tu réalises que tu es encore d'une grande naïveté sur les mesures anti-Covid). Je crois que j'ai perdu mon dernier zeste de capacité à motiver les troupes ce jour-là. Heureusement que Platinum est rentré fier de ses trouvailles et extrêmement motivé pour son activité créatrice, que je vous partage, parce que quand même, c'est joli (et comme la caractéristique du Land Art, c'est d'être éphémère, c'est tout ce qu'il reste de son œuvre!)


Comme les ACM étaient finalement assez aisés, il a fallu qu'une des deux maîtresses pimente un peu la semaine avec de l'expression écrite. Même si les apparences pourraient le laisser croire ces derniers temps, je n'ai aucune compétence d'enseignement et je ne suis pas de ces parents qui analysent le plan d'étude romand pour savoir exactement où doit en être leur enfant à la fin de tel degré. Donc quand j'ai lu "Raconte une histoire dont tu es le héros. Ecris au moins 10 phrases", je me suis pas bien rendu compte. D'abord, nous autres traducteurs, on compte en "signes" (caractères, espaces compris), en "lignes de 60 frappes" ou en "pages de la Chancellerie". Bref, 10 phrases, ça me paraissait pas grand-chose. Ben 10 phrases, pour un gamin de 9 ans et des brouettes, c'est l'ascension du Catogne en tongs. Alors il l'a rédigée, son histoire, mais je crois que ça a pris plus de temps que toutes les autres tâches scolaires de la semaine réunies. Pis faut voir le style, la concordance des temps et la richesse lexicale... Pas évident de savoir ce qu'il faut corriger, essayer de faire améliorer, etc. Quoi qu'en pensent les parents pleinement satisfaits de cette expérience d'école à la maison, c'est l'une de ces nombreuses tâches qui montrent nos limites en tant qu'enseignants improvisés.


Cette semaine on a continué à étudier le cycle de l'eau en sciences, et j'ai de nouveau été incapable de trouver toutes les réponses avant de voir le corrigé de la maîtresse. Même en matant 2 fois la vidéo de Jamy. Mon orientation plus littéraire était donc un choix pertinent. D'ailleurs, les leçons d'allemand, j'aime bien. Bon cette semaine, Platinum a ripé et sauté une étape de la leçon sur les chiffres; quand il a commencé à écrire eis, tsvai, drai, fier, funf, zex, sibèn, art, neun, tsèn, je me suis de nouveau dit que le "renforcement" n'était pas superflu. Une nouvelle preuve que sa mémoire visuelle est aussi performante qu'un masque de protection porté 20 fois. J'ai remarqué aussi une coïncidence flagrante entre le bâclage de travail et les propositions de partie de Monopoly. Quand tu dois entourer le groupe verbal et que dans la phrase "De nombreuses fleurs de montagne ont des couleurs vives", tu sélectionnes "de nombreuses", c'est que l'appel de Zurich Paradeplatz est trop fort, faut pas insister.

Ce qui m'amène à un problème de l'école à la maison autre que mon incompétence: les 4 x 45 minutes de travail scolaire ont une fâcheuse tendance à ne pas durer le même temps à tous les degrés. Quand l'ado a fini son travail du jour à 9h41, tu te dis que soit les profs avaient vraiment la flemme, soit les ados traînent tellement quand ils sont en cours que les profs les croient beaucoup plus lents qu'ils ne sont. Pour Sid je me rends moins compte, je le soupçonne de piquer un roupillon incognito avant de venir me faire son rapport (ou alors il termine son 34e roman de la quarantaine dans sa chambre... la réouverture des bibliothèques sauvera peut-être mon budget Kobo).
En parlant de Sid, après la prof de maths et ses SMS inquiets, le prof d'allemand qui lui demande une photo de son devoir avant de lui faire remarquer QU'IL NE SAIT PAS QUI IL EST s'il ne signe pas ses messages (???), voilà pas que le prof de gym téléphone l'autre jour pour prendre des nouvelles de sa forme physique. Il devrait la connaître, vu qu'il habite notre hameau et squatte sa terrasse chaque fois qu'on se fait une petite désalpe. Enfin peut-être qu'il ne reconnaît pas Sid, qui s'est jusqu'ici obstiné à partir marcher camouflé dans un gros training et un t-shirt noir, pour se plaindre de la température (et de l'effort incommensurable qui lui est demandé) après 10 minutes de balade. Comportement typiquement adolescent. Tout conseil maternel sur un équipement plus approprié sera obligatoirement dédaigné (limite il rajoute une couche juste pour me prouver que non, il n'aura pas trop chaud).

Cette 5e semaine d'école à la maison s'achève avec une nouveau devoir d'ACM; pas la pression, Platinum a jusqu'à la rentrée du 11 mai pour le réaliser. Ca semble une bonne nouvelle. Jusqu'à ce que tu lises les conditions de ses pièces de mosaïque (c.-à-d. après avoir lu les 8 pages sur l'histoire des mosaïques, ses artistes les plus connus, etc.). L'idée est d'utiliser tous les objets qu'on trouve pour garnir un carré de 15 x 15 cm. Jusque-là pas de problème. Mais pour corser l'affaire, des couleurs sont imposées en fonction du degré scolaire. Les petits héritent des couleurs primaires, fastoche; les moyens, parmi lesquels Platinum, des couleurs secondaires. Vert, orange, violet. OK, ça je peux gérer. Mais quand par curiosité tu regardes ce que sont les couleurs tertiaires, tu te rends compte que ton vert, faut que ce soit du vert secondaire, et pas du vert turquoise ou du vert chartreuse, qui sont eux réservés aux grands! N'ayant jamais entendu parler du vert chartreuse auparavant, on va faire comme si on n'avait pas vu hein... Toutes mes pensées aux grands (et à leurs parents, faut pas se leurrer) qui vont devoir chercher des objets vermillon ou ocre (mais pas orange), pourpre ou indigo (mais pas violet) ou turquoise ou vert chartreuse, mais pas vert! Il vous reste 7 jours.

7 jours, voilà ce qui reste de l'école à la maison à plein temps, tel en ont décidé les autorités fédérales et cantonales. J'ai écouté la conférence de presse du Conseil d'Etat, ça m'a semblé limpide. Après j'ai essayé d'expliquer ça aux gosses, ça a tout de suite semblé plus tordu: "Alors vous irez à l'école soit le lundi et le jeudi, soit le mardi et le vendredi la première semaine, la deuxième comme il y a le pont, vous irez que le lundi ou le mardi en alternance avec la première semaine, la troisième ça sera comme la première et la quatrième les jours alternés. Platinum, toi tu iras la moitié de la première semaine et après normalement, c'est juste le temps d'apprendre à te laver les mains plus de 2 secondes et demi et à ne pas crachoter sur la maîtresse - sur les copains tu peux, vous êtes pas vecteurs". Après lecture du courrier du Conseil d'Etat, j'ai percuté que j'arriverai à un total de deux jours complètement libérés pour travailler d'ici au 24 mai. Alleluia. Enfin faudra quand même faire du dîner, parce que les cantines seront fermées et que les grands-parents sont pas censés garder leurs petits-enfants, surtout que les miens sont data au niveau du risque, à part Platinum qui a 5 mois de câlins devant lui. Enfin je suis de ceux qui n'ont pas tout compris dans la théorie "les grands-parents peuvent faire des bisous mais pas garder" du brave M. Koch, parce qu'il craint que les parents contaminent les grands-parents en amenant leurs rejetons, OK, mais concrètement, comment les petits non-vecteurs font des bisous si c'est pas leurs parents qui les amènent? Par ailleurs, nombre de grands-parents ont été ces dernières semaines approvisionnés par leurs descendants, a priori si on arrive à poser un sac de courses (qui ne marche pas, lui) en restant à 2 m, on devrait pouvoir poser un gosse auto-mobile non? Finalement, y a que les nourrissons qui posent un peu problème, j'imagine que le jeté de bébé n'est pas cautionné par l'OFSP. Daniel, si tu pouvais donner des précisions? (cela dit je ne suis de loin pas concernée, et si mes enfants vont chez les grands-parents, ils peuvent y aller sans moi de toute façon).

A propos de la reprise, j'avoue tout de même être plutôt surprise par certaines réactions, entre les syndicats d'enseignants qui font des pétitions pour protéger leurs ouailles et les parents qui ont l'impression d'envoyer leurs gosses à l'abattoir. Concrètement, petits et grands vont être confrontés à des enfants qui ont été préservés des risques de contagion ces 7 dernières semaines, puisqu'ils n'ont été en contact qu'avec leurs parents, qui prenaient leurs précautions, se lavaient les mains en rentrant des courses, ne les emmenaient pas au magasin pour leur faire une sortie, ne les laissaient pas jouer avec les enfants du voisinage dont les parents sont fortement exposés de par leur profession, n'est-ce pas? S'inquiéter, c'est de facto remettre en question la capacité des autres à se conformer aux recommandations, à pratiquer les gestes barrières et à garder à la maison un enfant qui présenterait des symptômes. Bien sûr il y a des cas particuliers et certains ont des raisons valables de s'inquiéter et de demander une dérogation, mais ce n'est pas la majorité. Perso je renvoie donc mes enfants sur les bancs sans la moindre inquiétude ni pour eux, ni pour les personnes qu'ils vont croiser. Mais si des parents renoncent à la scolarisation à l'école jusqu'aux vacances d'été sous prétexte que le risque n'en vaut pas la peine "pour 6 semaines d'école", je prends volontiers les places inoccupées pour les miens, merci de vous annoncer. Non, parce qu'après deux mois de cohabitation permanente 24h sur 24, 7 jours sur 7, week-ends et vacances compris, je ne suis pas totalement sûre de ne pas représenter moi-même un danger pour la santé de mes enfants plus important que le petit coronamachin.

Je renvoie aussi mes enfants avec soulagement et satisfaction, parce que je ne crois pas que la "continuité pédagogique" que nous avons assurée pendant près de deux mois arrive à la cheville de l'enseignement présentiel assuré par des professionnels. Nous avons fait le nécessaire pour que nos enfants ne régressent pas, ne soient pas complètement largués au moment de reprendre le rythme scolaire, nous avons limité les dégâts. Mais reprendre l'école leur permettra de rétablir des contacts sociaux plus ou moins normaux, de rattraper peut-être un peu la matière nouvelle qu'ils auraient dû voir ces dernières semaines, pour finalement profiter des grandes vacances. Rendre à nos enfants leurs repères ne me semble de loin pas superflu. Et puis honnêtement, j'en peux plus du journal de bord, on a fait le tour de ce qu'on a cuisiné, jardiné, des jeux, des qualités et des défauts, si je dois encore inspirer Platinum 7 semaines x 5 jours pour écrire des phrases contenant deux adjectifs / un groupe nominal déterminant + nom + adjectif / un complément de phrase placé au début de la phrase, je vais craquer.



Déconfi -nement ou -ture?

Le 27 avril dernier a marqué un début de retour à la normale. Si tant est qu'aller chez le coiffeur avec un masque sur le pif soit un retour à quelque chose. Le lundi matin, 1h avant l'ouverture, il y avait la file devant les magasins de bricolage et les jardineries, paraît-il. La poisse, après cinq semaines de grand beau temps, les jardiniers en herbe ont eu droit à une pluie incessante depuis qu'ils ont pu acheter leurs plantons. Et tandis que les restaurants tentent de survivre en proposant des plats à l'emporter appétissants ou des livraisons organisées à l'arrache dont les recettes doivent à peine couvrir le coût de la marchandise, les chaînes de fast-food ont pu rouvrir leurs drives... avec évidemment un immense succès, c'est tellement logique de faire 40 ou 50 min de queue dans ta voiture pour de la "restauration rapide", 7 semaines que certains attendaient impatiemment de pouvoir profiter d'un repas si sain et si gourmand :smileyquivomit:

Ce qui m'a fait un peu plus souci que ces gens dans leurs voitures prêts à poireauter des heures alors qu'ils auraient simplement pu aller chercher leur nouveau râteau le lendemain ou prendre des bons steaks hachés chez leur boucher, c'est que l'assouplissement des mesures annoncé et mis en œuvre par le Conseil fédéral a sonné pour beaucoup comme une libération. Au magasin, cette semaine, le nombre de voitures avait doublé, tout comme le nombre de personnes âgées dans les rayons. Raisonnable ou pas? Ne nous exposons-nous pas à une deuxième vague virale, avec un retour en arrière et force regrets? Je rejoins totalement un célèbre journaliste de notre canard valaisan et son pot de yaourt périmé (https://www.lenouvelliste.ch/dossiers/coronavirus/articles/le-yogourt-moisit-il-dans-le-frigo-a-minuit-le-commentaire-d-olivier-hugon-932308): on nous laisse notre libre arbitre, que chacun l'exerce et prenne les risques qu'il juge acceptables par rapport au bénéfice qu'il en retire. Mes parents avaient besoin de sortir, de parler avec leur copine caissière, de voir de leurs propres yeux des barrières plastifiées sur les tupperwares. Mon premier réflexe a été de leur signaler que la pandémie ne s'était pas achevée le 26 avril à minuit. Inquiétude légitime puisque depuis près de deux mois, nous nous inquiétons de la santé de "nos aînés" et faisons notre maximum pour la préserver. Mais c'est leur choix... et il y a un moment où la vie doit reprendre son cours, un peu du moins. Que cela ne nous empêche pas de continuer à faire de notre mieux pour protéger les autres, un mois, six mois, un an... aussi brièvement que possible, mais aussi longtemps que nécessaire (#teamBerset).


Note pour Christophe: merci pour la régularité de tes commentaires, j'ai répondu au dernier, une fois n'est pas coutume ;)