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mardi 19 mai 2015

Appelez-la Madame

Jeudi 7 mai 2015. Nous sommes assis dans l'obscurité en attendant l'artiste. Musique entraînante, puis elle apparaît, vêtue comme à son habitude de noir, une combi qui lui va à ravir, un soupçon de transparence sur les flancs pour la féminité, sa coupe au carré qui a repoussé. Il faut une seconde à ce petit bout de femme pour envahir  l'immense scène et irradier de sa présence la salle gigantesque. D'accessoires, elle n'en a pas un; sa gouaille lui suffit largement. Florence Foresti se suffit à elle-même.

Pendant près de deux heures, elle nous régale de sa verve. Les bons mots et les vannes s'enchaînent à un tel rythme qu'on ne parvient même pas à les retenir. Après Mother Fucker qui présentait son expérience de la grossesse et des débuts de la maternité, elle nous parle de son "après". De la quarantaine abordée avec peu d'espoir et un cynisme certain, de la maternité version "enfant qui grandit" et des joies des devoirs, des autres mamans, forcément mieux organisées, plus performantes, meilleures mères qu'elle - elle considère elle-même qu'elle aurait fait un super papa, mais que comme maman, elle laisse à désirer. A titre personnel, j'ai l'immense privilège de me sentir visée par les vannes sur les mamans de famille nombreuse (c.-à-d. à partir de 2 enfants, selon la vision de l'humoriste), encore davantage lorsqu'elle parle des mamans de garçons, génitrices à succès. On sent que cette maman de fille unique a été égratignée par quelques remarques malvenues. Pour ma part, avec mes trois blondinets, je suis définitivement promue dans la catégorie des pondeuses d'élite. C'est de bonne guerre, Florence, la vie serait tellement moins drôle sans stéréotypes et idées préconçues. Si ça te rassure, même quand on atteint le stade ultime de la réussite procréatrice - les 3 garçons, donc - on se ramasse tout autant de remarques d'une pertinence toute relative (la palme étant attribuée à "va falloir faire un 4e pour tenter la fille" - euh ouais, ou pas quoi, j'ajoute des branches à mon arbre généalogique, là, je suis pas en train de jouer au casino...). Fallait que je le dise. Mais je vais tenter de rester objective malgré cette jalousie totalement justifiée à l'égard de mes trois jackpots dans la grande loterie de la conception.

Revenons à Florence. Je dirais que la justesse de ses réflexions et l'humour qu'elles recèlent feraient sourire un Saint-Hubert (mais si, vous savez, ces chiens qui ont l'air de porter toute la misère du monde sur leurs arcades sourcilières). Juste, c'est bien le mot qui convient: tout est juste. Un spectacle bien construit, dans lequel on ne perd pas le fil une seconde; un soupçon de caricature, bien sûr, parce que la "maman calme" n'est risible que si on augmente un peu le trait, des imitations brillantes, du guépard en pleine course (démonstration indiscutable du fait que l'homme n'est pas fait pour courir, qu'il faudrait que je partage à l'occasion avec certains joggeurs invétérés de ma connaissance) à une Vanessa Paradis plus vraie que nature (ou du moins plus marrante), un jeu de scène millimétré, où chaque pas devient un outil comique...

Et puis il y a le fond. La justesse des questions qu'on se pose sur la vie et ses différentes étapes, les réponses que sont susceptibles de nous apporter nos contemporains et nos aînés. La justesse d'un regard critique aussi, sur la vie, sur la société et ses usages actuels, sur nos modèles et ceux de nos enfants. Car elle est féministe, la Forest'. Elle s'insurge contre l'auto-dévalorisation de la femme, contre les starlettes en micro-tenue que le show-biz impose à nos adolescentes comme idoles. Son discours est plus efficace que n'importe quelle Femen sur la place publique. Mais ce qui est plus efficace encore pour défendre l'égalité des sexes, c'est sa seule présence sur scène. J'ai vu Jamel dans cette même salle; j'ai vu Gad il n'y a pas si longtemps. J'ai aimé aussi. Mais en sortant de l'Arena ce soir-là, j'avais le sentiment indiscutable d'avoir assisté au meilleur one-man-show que j'aie jamais vu. Alors si vous ne savez pas que faire en décembre, la jeune quarantenaire repasse par Genève. Allez la voir, à Genève ou ailleurs, que vous ayez quarante ans, ou plus, ou moins. Vous ne le regretterez pas. Et si par bonheur vous arrivez à obtenir un autographe ou un selfie avec l'artiste, dites-lui merci pour moi... et appelez-la Madame.

1 commentaire:

  1. WOW!
    Franchement, je voudrais que quelqu'un sache comment faire pour envoyer ce texte à Madame.... ça lui ferait tellement de bien, à elle aussi!
    Y a-t-il quelqu'un dans ce blog qui sait le faire?
    Tante Babette

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